Politique alternative I : ‘délinkage’ ou une autre mondialisation ?
Résistance, alternatives.
Introduction : 3 idées qui sous-tendent le raisonnement : - La dynamique des luttes altermondialistes actuelles pose en creux certains des éléments de la société à construire. - Une double rupture est toujours nécessaire : externe (domination impérialiste) et interne à chaque société (rapports de classe et toutes formes d\’oppression). - Les luttes altermondialistes commencent à poser les bases d\’un anticapitalisme et d\’un internationalisme concret.
I/ De l\’antilibéralisme à l\’anticapitalisme.
A/ Les luttes anti-libérales et altermondialistes ont une dynamique anticapitaliste
- Des évolutions communes, dans différentes régions du monde, des nouvelles luttes et nouveaux mouvements sociaux
dans le mouvement altermondialiste ou en dehors de lui.
- Dynamique de contestation globale de la logique de fonctionnement du système à partir de problématiques spécifiques de secteurs de la société.
- Dans certaines luttes, on trouve des réseaux de groupes de population et d\’intérêts différents qui convergent (ex : syndicats de salariés, associations de consommateurs, de quartiers, de défense de l\’environnement, féministes, etc.. contre multinationales).
- Liens entre structures de luttes anciennement implantées (syndicats..) et nouvelles structures qui apparaissent avec les nouveaux objectifs de luttes.
- Nouvelles méthodes de lutte (désobéissance civile) et de fonctionnement de certains nouveaux mouvements (réseaux). Articulation de la contre-expertise militante, de l\’élaboration théorique, de l\’éducation populaire, et de l\’action concrète sur le terrain.
- Nouvelles exigences démocratiques et de contrôle des luttes par les participants.
- Posent en creux par leur pratique la question de nouveaux rapports entre le « social » et le « politique »
- Le mouvement altermondialiste lui-même a la possibilité d\’être au cœur de la construction de ce nouvel anticapitalisme, pour plusieurs raisons (subjectives et objectives)
- Il présente une tendance à fédérer et articuler les autres mouvements (cf. Forum social mondial, Forums continentaux), malgré les difficultés que connaissent actuellement ces initiatives pour passer à un niveau supérieur de la confrontation politique.
- S\’attaque à des problématiques de plus en plus diverses et nombreuses, qui font système.
- L\’étape actuelle du capitalisme ne laisse pas d\’espace pour des « réformes » ou des « régulations » : toutes les revendications antilibérales acquièrent de fait une dynamique anticapitaliste (ex : contrôle des mouvements de capitaux).
- Le mouvement altermondialiste s\’attaque à ce qui fait l\’essence de l\’étape actuelle du capitalisme :
- la mise en concurrence généralisée des tou(te)s les travailleur(se)s et de tous les peuples à l\’échelle de la planète entière.
- la liberté totale des capitaux et des multinationales
- la marchandisation générale et absolue de toutes les ressources et de toutes les activités humaines
- le caractère absolu de la propriété capitaliste.
B/ Les réponses aux questions stratégiques montrent en pratique qu\’une régulation du capitalisme mondialisé et libéral n\’est pas possible.
- Lutte contre les organisations internationales (OMC, FMI, Banque mondiale, AMI, AGCS)
- Faut-il chercher à les transformer ou doit-on viser leur démantèlement ?
Chaque revendication de réforme (ex : publicité des négociations) remet en cause leur logique même de fonctionnement.
- Inclusion ou exclusion de dimensions sociales ou environnementales ? (cf texte Lee Chang-geun)
Il faut exclure le plus possible de domaines de l\’emprise de l\’OMC.
- Résistance à toute mise en concurrence mondiale des salarié(e)s ou des paysan(ne)s
- La piège de la clause sociale : ne pas se tromper.
- mettre en cause d\’abord le modèle exportateur.
- sanctionner d\’abord les multinationales
- récuser l\’OMC comme cadre pour défendre les droits sociaux (cf 1)b)
- Rechercher de nouvelles formes d\’articulation internationale de luttes
- résister à toute idée d\’opposition d\’intérêts entre les peuples au Nord et au Sud.
- idée que toutes résistances participent à construction d\’un même rapport de force (ex Alena luttes de salarié(e)s US en solidarité avec salarié(e)s mexicaines même firme).
- La lutte contre la mondialisation capitaliste se fait aussi sur place, contre nos propres classes dominantes nationales au Sud comme au Nord.
Deux conséquences : - ne pas considérer Europe comme rempart contre impérialisme US ni oublier le capitalisme européen. - au Sud, ne pas envisager une alliance avec capital local pour s\’opposer aux multinationales (cf débat ).
3) Nécessaire perspective de classe et de lutte contre toutes les oppressions (notamment de genre) : contre toute alliance au nom de l\’ « antilibéralisme » ou « anti-impérialisme » avec des forces religieuses ou nationalistes réactionnaires.
C/ Peut-on s\’en tenir à une démarche de contrôle et de contre-pouvoir ?
- Le mouvement pour l\’instant n\’envisage pas rupture politique centrale
- Le risque principal n\’est pas tant le « réformisme », que le repli et la systématisation de stratégies autour d\’îlots de survie, avec adaptation soit au marché, soit aux relations traditionnelles d\’oppression. (« économie solidaire »).
II/ « Un autre monde est possible » : lequel ?
A/ Démondialisation ou autre mondialisation ?
Cf Débat W. Bello/ P. Bond et W. Wallis
- Réorienter les économies vers l\’intérieur : sur quelles bases ?
- Comment définir les priorités sectorielles ?
- Selon quelle procédure démocratique ? (ex : budget participatif : est-il possible à grande échelle ?) - En fonction des intérêts de quelle(s) classe(s) ? - En fonction de quels rythmes d\’accumulation (biens d\’investissement ou de consommation) ?
- Quelle réforme agraire, quelle organisation de la propriété et du travail ?
- Les leçons des expériences passées (Nicaragua, etc.) et présentes (Bolivie, Equateur, Venezuela)
- Quelle nouvelle architecture de l\’économie mondiale ?
- de nouvelles institutions sur d\’autres principes (coopération et non concurrence, etc.)?
- une nouvelle régionalisation ?
- la possibilité de « sas » et de contrôle de leurs échanges pour les économies du Tiers-Monde
- Refuser une autre mondialisation : une tentation et un danger politique
- « souverainisme » et courants chauvins dans les pays industrialisés
- replis « culturalistes », renforçant les oppressions straditionnelles
- à l\’opposé, le caractère contradictoire de la mondialisation renforce les potentialités de luttes communes.
B/ Une autre société se dessine dans les luttes.
- L\’espace de la gratuité sociale
a) Les possibilités « technologiques » : contre le brevetage (médicaments, logiciels…)
b) Services publics et Etat social : un espace disputé à la marchandise.
- Une orientation de la production vers les besoins de la majorité de la population
a) Capitalisme incapable de satisfaire ces besoins : consommations essentielles ou services publics.
b) L\’exigence de satisfaction de ces besoins implique une remise en cause des droits de la propriété capitaliste.
c) Elle implique aussi une certaine croissance, dont il faut déterminer le contenu (social et écologique) : des crèches-hôpitaux- écoles plutôt que des automobiles-- refuser les illusions dangereuses de la « décroissance » et du « refus du développement »
Conclusion : - Il y a dans le mouvement altermondialiste des question stratégiques ouvertes, de la réponse desquelles dépend la dynamique anticapitaliste des luttes qu\’il impulse. - La problématique anti-impérialiste est essentielle mais ne suffit pas pour poser les bases d\’une alternative globale au capitalisme - Il est nécessaire d\’articuler les luttes entre toutes les dimensions d\’oppression et de domination, sans les hiérarchiser.