Alex Callinicos, "Brexit: un tour du monde historique»
« […] Le matraquage incessant de déclarations du monde des affaires contre le Brexit a peut-être été orchestré par le 10 Downing Street [le cabinet du Premier ministre britannique, NdT], mais ces déclarations étaient sincères malgré tout. D’importantes banques d’investissement et entreprises multinationales, la CBI [Confederation of British Industry, principale organisation patronale britannique, NdT], la Banque d’Angleterre, Lloyds, la Table ronde des industriels européens [lobby de grandes multinationales européennes, NdT], le Fonds monétaire international, l’OCDE : toutes ces institutions sont des références si l’on cherche à connaître la situation de capitaux moteurs de l’économie, et elles ont toutes dénoncé le Brexit […]. Pour quiconque avait des doutes quant à ce que souhaitait le capital, ceux-ci devraient avoir été balayés par les énormes chutes sur les marchés financiers du monde entier au lendemain du référendum […].
« Tout comme Donald Trump a capturé le Parti républicain sur des bases qui rompent avec la stratégie impérialiste étatsunienne telle qu’elle existe depuis le début des années 1940 (celle de la construction d’un ordre mondial capitaliste-libéral soutenu par la puissance militaire américaine), nous sommes [désormais] en présence d’un paradoxe dans lequel le principal parti des grandes entreprises [le parti conservateur au Royaume-Uni] s’éloigne des intérêts du capital […].
« Le capitalisme britannique – et peut-être mondial – est en train de s’engouffrer dans une mer très agitée. En cherchant à y naviguer, le parti conservateur va certainement organiser de nouvelles attaques – par exemple, en imposant des coupes budgétaires supplémentaires afin de rassurer les marchés […]. D’un côté, il y aura les négociations du Brexit, où il importera fortement de savoir en détails comment l’État britannique se désengagera de l’UE – le combat visant à préserver la liberté de circulation en est un exemple évident. De l’autre côté, il pourra y avoir des référendums portant sur la dislocation du Royaume-Uni – probablement en Écosse, et l’on peut en imaginer un dans le Nord de l’Irlande. Il y a également une lutte immédiate à mener avec les Bourbons de la droite du parti travailliste. L’unité contre le racisme, l’austérité et la guerre, ainsi que pour préserver l’ouverture politique amenée par l’élection de Corbyn, est urgemment nécessaire. »