La Quatrième internationale et Socialist Resistance

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Actuellement, Socialist Resistance (SR) cherche à construire une nouvelle organisation socialiste avec la Anti Capitalist Initiative (ACI) et l’International Socialist Network (ISN). Ce processus pourrait s’élargir pour embrasser d’autres groupes. Un élément qui est clair, c’est que les militants d’antécédents différents n’ont qu’une conception partielle de ce qui est la Quatrième internationale. Et d’autres pensent que notre orientation est carrément erronée. Liam Mac Uaid établit ce qui est la QI, ainsi que ce qu’elle n’est pas, et pour quoi nous pensons que le fait d’y participer contribue à une compréhension plus adéquate de nos tâches politiques au sein de l’État britannique et à notre internationalisme.

Le moyen le plus aisé de découvrir ce que font la Quatrième international et ses organisations adhérentes est de consulter son site web International Viewpoint nt : Inprecor, en français. Vous y trouverez des documents, des entrevues, des articles analytiques plus étoffés et des documents importants de nos congrès. À la lecture de ces documents, vous serez en mesure de tirer vos conclusions quant à la pertinence de chercher à maintenir des liens forts au plan international entre les socialistes. À notre conférence de 2013, SR a voté sa propre dissolution advenant une fusion réussie avec l’ACI et l’ISN. C’est une étape radicale, et un engagement peu commun chez les organisations. Toutefois, nous allons proposer que les membres de la nouvelle organisation auront le droit de faire partie d’un caucus Quatrième internationale qui ne serait pas restreint aux anciens membres de Socialist Resistance. Cette disposition a existé au sein d’autres organisations qui avaient des partisans de la QI dans leurs rangs, comme Solidarity aux Etats-Unis, une organisation qui a voté son affiliation à la QI récemment. Malheureusement, nous n’avons pas encore eu l’occasion d’en discuter avec nos partenaires au processus de regroupement et notre insistance a dérangé certaines personnes avec qui nous cherchons à collaborer. On craint que SR retienne une organisation secrète qui sous les ordres d’une direction international. Ce n’est pas envisageable et les membres actuels de SR s’érigeraient contre une telle malhonnête politique. Il y a plusieurs années que la QI a décidé de ne plus se présenter comme le « parti mondial de la révolution ». La QI n’est pas la Tendance socialiste internationale (TSI) du SWP ou le Comité pour une Internationale ouvrière (CIO – CWI) ; maintenant, elle comprend des organisations dont les origines ne remontent pas à la tradition trotskyste.

Depuis longtemps, elle a cessé de se définir comme une organisation centraliste démocratique et ne cherche pas à agir de la sorte. Elle n’impose pas des décisions ou politiques à ses sections ou partisans, particulièrement par rapport à l’orientation au plan national. Une telle approche est contraire au concept de l’internationalisme chez la QI. Nous avons une optique contraire, comme vous allez le constater à la lecture de notre bilan du dernier Congrès mondial :

« Le Comité international est une instance « fédérale », ce que signifie que chaque réalité nationale a ses propres représentants… l’histoire a enseigné à ce courant international qu’on ne peut pas imposer une ligne politique d’en haut, et encore moins par un parti « guide ». Chercher texte officiel. La QI cherche plutôt à débattre et d’en venir à une approche générale à la politique dans une conjoncture donnée. Elle débat de et adopte des positions et de déclarations sur les grandes questions de la politique internationale. Les sections et les adhérents ont le plein droit de soutenir ou non ces positions et déclarations, et souvent, elles ne le font pas. Un exemple actuel est en Grèce où la section officielle soutient Antarsya (contrairement à la plupart des autres composantes de la QI), tandis qu’une organisation sympathisante est favorable à Syriza. SR n’a pas hésité a faire la critique publique de nos camarades grecs à notre site web, ce qui a produit un certain consternation chez d’autres courants politiques mais ce qui est parfaitement normal chez nous.

Le même document du Congrès mondial est catégorique quant aux limites de plusieurs groupes participants. C’est inutile d’induire en erreur votre propre effectif ou le monde extérieur par le recours à une exagération de votre force :

« C’est évident que nous devons maintenir un sens de la proportion : dans plusieurs régions du monde, nous parlons de petites organisations politiques, voire de petits groupes, même si règle général il s’agit de collectifs militants impliquées dans leur réalité nationale, sociale et politique. Mais la participation à un cadre international aide à conserver une certaine vitalité et capacité de maintenir le fil et une discussion collective ».

Il est vrai que le petit groupe de marxistes révolutionnaires antistaliniens, dirigé par Trotski, qui a déclaré la formation de la Quatrième internationale a affirmé qu’elle était le Parti mondial de la Révolution socialiste. Ils avaient la perspective que la guerre à venir allait ouvrir une nouvelle vague de révolutions qui détruiraient le stalinisme et le fascisme. Plusieurs centaines de nos camarades ont payé de leurs vies au Vietnam, en France, en Grèce, en Italie, en Belgique et aux convois arctiques pour leur engagement à cet exigence de maintenir en vie un fil marxiste révolutionnaire qui a lié la révolution bolchévique aux nouvelles révolutions Cette histoire fait partie de nos origines, mais il s’agit justement de l’histoire. De nos jours, la Quatrième internationale a une conception radicalement différente de son rôle et de sa contribution à la lutte des classes.

La démocratie socialiste

Peut-être plus que tout autre courant marxiste, elle a cherché à théoriser et mettre en œuvre une compréhension de la démocratie socialiste à la fois au sein de ses propres organisations et dans une société socialiste. Le titre et beaucoup du vocabulaire relève d’une époque révolue, mais La Dictature du prolétariat et la démocratie socialiste contient plusieurs des idées de force qui informent comment nous faisons la politique. Il s’agit de la démocratie interne la plus large au sein du parti lui-même, avec droits pleins et entiers d’organiser les tendances avec possibilité de débats publics entre elles avant le congrès du parti ; refus d’interdiction des fractions;

Intégration réelle du parti dans une internationale révolutionnaire et acceptation de la critique internationale fraternelle par des organisations révolutionnaires d’autres pays.

Ces deux conceptions découlent d’un examen et d’un rejet des fonctionnements des partis et des régimes staliniens. Ils ont supprimé toute dissension en dehors de limites très étroites ; l’unité et l’obéissance étaient estimées avant tout autre qualité, une attitude qui était également répandue chez plusieurs groupes qui ont rejeté le stalinisme tout en conservant certaines de ces conceptions d’organisation. La conséquence de ces conceptions était d’assurer qu’un groupe étroit de dirigeants allait dominer la politique et la société. En contraste, la Quatrième internationale soutient que :

(…) il n’y a pas de parti infaillible. Il n’existe pas non plus des directions de parti, des majorités de parti, des comités centraux léninistes ou des dirigeants de parti individuels, infaillibles. Le programme marxiste n’est jamais un programme définitivement achevé. Il n’y a pas de situation nouvelle qui puisse être entièrement analysée en fonction de précédents historiques.

Comme les débats récents au sein de l’extrême gauche britannique ont vivement démontré, les références à Lénine et à Zinoviev n’éclairent pas grande chose quand on cherche à comprendre la désintégration d’une organisation. Évoquer les propos des révolutionnaires d’il y a presque un siècle à propose de circonstances complètement différentes fait penser à une prêtrise qui recourt aux textes sacrés pour condamner les hérétiques. En contraste, les instances de direction de la QI et celles de sections comportent des garanties explicites des droits minoritaires. Ainsi, par exemple, si une position remportait 30% des voix à une conférence de Socialist Resistance, ses partisans auraient droit à 30% des postes au comité national. Il est fort possible que la minorité avait raison et que la majorité avait tort et que les gens allaient changer d’avis.

Protection de la dissidence

Le droit au désaccord est garanti à toutes les sections de l’Internationale. Contrairement à d’autres courants qui ont une organisation internationale et insistent que l’ensemble de leurs partisans adhère à un seul groupe national, ce n’est pas rare qu’il y ait des membres de la QI au sein de deux ou trois groupes ou partis dans un pays donné. En ce moment, c’est le cas en France, en Italie et aux Etats-Unis, par exemple. Parfois, les gens en arrivent à des analyses très différentes sur ce qu’il faut faire dans leur pays, et scissionnent. Si ces gens veulent maintenir un lien avec la QI, on leur donne le droit de le faire parce que les conjonctures politiques et les bilans évoluent. Il est évident que ce serait préférable que l’ensemble des partisans de la QI adhère à une organisation commune mais l’obligation de le faire serait une réponse de bureaucrate. Tant qu’il y a un cadre politique générale et qu’on continue à participer aux instances de la QI, ils peuvent y rester.

Toutes les rencontres d’instances de la FI (le Comité international et le Congrès mondial) sont pleinement démocratiques avec le plein droit des organisations dissidentes de présenter et de défendre leur point de vue et leurs divergences. Les positions minoritaires exprimées au Congrès mondial sont pleinement représentées au Comité international.

De notre point de vue, l’existence d’un caucus QI dans une nouvelle organisation issue des discussions de regroupement en cours serait pleinement compatible avec la démocratie de cette organisation et aurait beaucoup à contribuer à la construction de celle-ci.

C’est un modèle qui a su attirer des organisations en provenance de racines fort variées. La QI a fait des progrès substantiels en Amérique latine et en Asie. En 2012, le Parti communiste du Bangladesh marxiste léniniste est devenu un observateur permanent, une étape préliminaire à devenir une section. En 2003, au 15e Congrès mondial de la QI, le Parti révolutionnaire des travailleurs – Mindanao (RWP-M) est devenu une section de la QI. Le NSSP sri lankais a adhéré à la QI après son départ du CWI et l’Internationale a également établi un rapport avec le Parti de libération populaire (PLP) en Indonésie ; celui-ci en est maintenant un observateur permanent.

Écosocialisme

La QI est le seul courant international marxiste révolutionnaire à se définir comme écosocialiste. L’écosocialisme est une déclaration que la désignation « socialiste » n’est plus suffisant ; que les questions écologiques ne sont plus un simple complément pour nous, mais un élément central de toute notre action, une composante fondamentale de notre identité programmatique.

C’est un signal que nous rejetons la logique capitaliste de la croissance insatiable, une composante de la nature du système qui alimente les exigences de la production capitaliste. L’écosocialisme signifie la recherche d’une société fondée sur la rationalité écologique, le contrôle démocratique, l’égalité sociale et la prédominance de la valeur d’usage par rapport à la valeur d’échange.

Ce qui signifie que nous visons une croissance de la qualité de la vie plutôt que de la quantité de rendement, pour l’abondance du temps libre plutôt que l’abondance de biens inutiles, et une sortie progressive de la prise de décisions quant à la production et la distribution du « marché libre », pour les soumettre à la planification démocratique rationnelle.

Étendre le modèle capitaliste occidental de la promotion des marchandises et de la production sans limites pour réaliser la croissance maximale à des pays émergents comme la Chine, l’Inde et le Brésil Le capitalisme est incapable de changer la donne. Sa réponse au réchauffement global est une combinaison de mesures marchandes et la généralisation de technologies dangereuses, notamment plus de centrales nucléaires, le charbon dit « propre », l’exploitation accrue des sables bitumineuses et des gaz de schiste.

Ainsi, avec la fonte de la calotte glaciaire et la prévalence accrue des phénomènes météorologiques extrêmes la question du changement climatique anthropogène doit rester au cœur de nos préoccupations. Nous devons être au cœur des campagnes sur ces questions et intégrer l’environnement à chaque volet de notre intervention.

Féminisme

L’oppression des femmes dans cette société a un fondement social, qui exige une expression politique autonome des femmes. Un mouvement féministe rend cette expression possible et oblige les organisations politiques d’apprendre de ses expériences et ses regards.

Nous cherchons à intégrer les expériences des femmes à notre pratique politique parce que, bien que chaque femme puisse lutter pour l’autonomie économique et sexuelle par beaucoup de moyens, seul un mouvement actif et combatif permettra la réaffirmation de l’identité féminine, individuellement et collectivement.

Socialist Resistance et la Quatrième internationale se définissent comme organisations féministes et un accord quant à l’importance du féminisme pour les marxistes figure parmi les points d’accord principaux qui a rendu possible notre convergence avec ACI et ISN.

Une des voies vers ce développement est le questionnement radical des divisions traditionnelles au sein de la famille et de la classe ouvrière. La première de celles-ci est la division sexuelle du travail, une question de plus en plus pressante en vue de la vague d’austérité actuelle, où les femmes sont touchées de façon disproportionnée par les compressions salariales, la précarisation, les compressions aux services d’aide et les licenciements.

Nous avons tiré des conclusions organisationnelles de ces questions. Les caucus femmes constituent un volet permanent des conférences de SR et de la QI. Nous cherchons une majorité féminine aux commissions qui abordent les plaintes internes et visons 50% de camarades femmes aux structures de direction.

Les Partis larges

Une composante importante de l’action de Socialist Resistance depuis plusieurs années maintenant est le soutien au développement d’un parti avec une base de masse, à la gauche du parti travailliste. Nous avons œuvré au sein de Socialist Alliance et de Respect. Nous avons tenté de collaborer avec TUSC et maintenant nous accordons un soutien important à Left Unity. Nos liens avec la QI a informé beaucoup de notre action dans ce domaine. Nos camarades au Portugal, au Danemark, en Italie, en France et en Allemagne, entre autres, ont connu un éventail d’expériences positives et négatives dans la construction de partis à la gauche de la social-démocratie et nous avons suivi celles-ci de près. Notre livre New Parties of the Left cherche à réunir et rendre accessible au public lecteur anglophone la signification de ces développements européens. Notre point de départ est que le social démocratie, notamment le parti travailliste britannique, a connu un virage qualitatif à droite depuis deux décennies sous l’impulsion du néolibéralisme. Nous pensons qu’il existe un espace politique pour une organisation de 20 – 30 000 personnes, qui pourrait réunir des révolutionnaires, des personnes radicalisées par les nouveaux mouvements anticapitalistes, les syndicalistes militants et d’anciens membres du parti travailliste. Respect a offert un aperçu de ce potentiel et Left Unity démontre également la nécessité d’une telle organisation.

En puisant dans notre présence au sein de Respect et ce que nous avons appris des camarades de la QI, nous avons développé une optique sur les règles générales nécessaires à la réussite d’un tel projet. Celui ci doit être démocratique et ouvert à différents points de vue. Il doit être libre de la domination d’un chef charismatique. Il doit fonctionner comme parti et non pas un pacte de non-agression ou une alliance électorale. Les organisations d’extrême gauche qui y participent ne doivent pas chercher à l’hégémoniser par des moyens organisationnels pour gagner les débats politiques. Nous ne connaissons pas d’autres courants de la gauche radicale qui ont tiré des conclusions semblables et nous sentons que nos liens avec la QI étaient essentiels pour développer cette optique, maintenant partagée par plusieurs membres de ACI et ISN.

Conclusion

Nous pensons que la Quatrième internationale a fait plus que tout autre courant marxiste, pour retenir les principes essentiels de la tradition révolutionnaire et de tenir compte du fait que le début du 21e siècle est différent du début du 20e siècle. Nous avons intégré l’importance du changement climatique et du féminisme pour le marxisme révolutionnaire. Nous avons examiné en grand détail la centralité absolue de la démocratie et du pluralisme chez les organisations socialistes et les sociétés postcapitalistes. Dans plusieurs pays européens, nous répondons à la lente décomposition de la social-démocratie par un engagement actif aux nouveaux partis de gauche qui émergent en réponse à ce processus. Il n’y a pas d’agenda occulte dans notre souhait de maintenir un lien avec nos camarades dans d’autres régions du monde. Nous pensons que ces liens ne feront que contribuer au renforcement et au développement politique d’une nouvelle organisation.